Si vous ne vous mettez pas d’accord, ne revenez pas !

Si vous ne vous mettez pas d’accord, ne revenez pas !

« Si vous ne vous mettez pas d’accord, ne revenez pas ! » C’est ainsi que de nombreux Libanais, dont des victimes de la guerre civile, regroupés sur la route de l’aéroport de Beyrouth, ont salué hier les délégations libanaises, pro-gouvernementales et de l’opposition, en partance pour la conférence du « dialogue national libanais » de Doha.

C’est dire à quel point les Libanais s’opposent à une guerre fratricide et aspirent à un règlement pacifique de la crise qui secoue le pays depuis plusieurs mois. Une crise bel et bien politique, même si certaines puissances régionales et mondiales, et leurs alliés au Liban, tentent de transformer en conflit interconfessionnel qui embraserait le Liban et ferait de ce pays un deuxième Irak. En effet, aussi bien l’opposition que le gouvernement, ont des alliés et des sympathisants appartenant à l’ensemble du spectre confessionnel libanais : sunnites, chiites, diverses Eglises chrétiennes, druzes, etc. Le conflit libanais n’est rien d’autre qu’une opposition d’objectifs sur le partage du pouvoir et surtout sur la place de la résistance au Liban.

Lors de la récente réunion ministérielle de la Ligue des Etats arabes consacrée au Liban, tenue au lendemain des affrontements qu’avait connu Beyrouth et à un moindre degré d’autres régions du Liban, il a été décidé la constitution d’un comité ministériel coprésidé par le chef du gouvernement du Qatar et le secrétaire général de la Ligue, et comprenant les ministres des Affaires étrangères de huit pays : Algérie, Bahreïn, Djibouti, Emirats arabes unis, Jordanie, Maroc, Oman et Yémen. Ce decet arabe qui s’est rendu à Beyrouth a réussi en un temps record à convaincre les diverses parties en conflit à se mettre autour de la table du dialogue. Il a même pu les faire prendre le même avion pour se rendre à Doha. Comment cet exploit a pu se produire ? Peut-être à cause de l’absence remarquée dans ce comité des représentants d’Arabie saoudite, de Syrie et d’Egypte, qui ont perdu depuis longtemps toute crédibilité pour jouer un quelconque rôle dans le dénouement de la crise libanaise.

La conférence du « dialogue national libanais » a été inaugurée hier soir par une brève allocution de l’émir du Qatar qui a souhaité la bienvenue et le succès aux participants ; les travaux commencent effectivement ce matin. Nous prions pour qu’ils aboutissent à un accord qui protègerait les Libanais de l’enfer d’un conflit violent qui ruinerait le pays et au terme duquel aucune partie ne sortira gagnante, un accord qui empêcherait à ce que le Liban ne se transforme en scène où se déroulerait une guerre par procuration entre des puissances étrangères. Ceci n’est possible que si tous les participants à la conférence de Doha prennent conscience de la lourde responsabilité nationale qu’ils portent sur leurs épaules, et des attentes et espoirs immenses de leurs concitoyens. A défaut de cette conscience, et si par malheur, ils persisteraient à servir des agendas étrangers au lieu de se préoccuper du sort de leur pays, alors ils feraient mieux de ne pas retourner Beyrouth, mais d’aller rejoindre leurs parrains respectifs. Le peuple libanais trouverait de bien meilleurs représentants.

Dr Abbas Aroua
Directeur du Centre Cordoue d’Etudes de la Paix
Genève, le 17 mai 2008

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